L’Institut d’études lorettaines est fier de présenter, sous forme d’un colloque, les propositions retenues en vue du dossier à paraître dans la revue Perspectives lorettaines.

Le public est attendu à l’Institut le 18 mai 2024, dès 13h00. Les présentations se dérouleront de 13h30 à 17h30, avec une pause vers 15h30, durant laquelle sera servi un ogdenbit.

Le colloque se terminera par un vin d’honneur. Une boîte sera mise à la disposition du public pour recevoir des contributions.

Programme des conférences (horaire exact à déterminer) :

Camille Beaudet, « Ogden Bit ! ou l’imaginaire de la suprématie domestique »
  • Au mois de janvier dernier, nos amis étaient invités à la maison pour visionner cette fameuse comédie autrichienne kitsch portant le noble titre d’Ogden Bit ! – voyez l’importance du point d’exclamation, préfigurant de cette œuvre le burlesque et la vitalité –, un film dont l’intérêt repose – bien qu’un professeur de philosophie de notre connaissance y joue tous les rôles principaux, dans une myriade de costumes – sur les scènes de domestiques.

    Quelques jours plus tard, quelle ne fut pas notre surprise de constater que Jonathan Glazer – par génie, prescience, plagiat par anticipation ? – avait construit une intrigue fort ogdenbitienne dans son plus récent film, The Zone of Interest. Ce nouveau traitement de l’imaginaire de la préséance de la domesticité, s’il ne fonde pas un champ du savoir – l’Ogden Bit éponyme l’ayant déjà largement investi –, donne l’occasion d’une nouvelle plongée dans l’étude des marges, des limites, et surtout de la propension de ceux qui les occupent à quérir l’attention, l’intérêt du sujet.

    Nous nous proposons donc, dans cette communication, de retracer l’histoire esthétique de ce renversement de la sujétion ; Dieu seul sait si, en chemin, nous n’inaugurerons pas une toute neuve agentivité.

Milo E. Erlanger, « Le rêve duodécimal de l’og-den-bit »
  • Il y a quelques décennies à peine, l’Ogdenbit était synonyme d’espoir, symbole d’un futur empreint des délices d’un techno-capitalisme égalitaire. À l’origine la proposition, radicale à l’image de son instigateur, le jeune Kurt von Gøl, d’une nouvelle méthode de calcul duodécimale : l’og et le den désignant les unités ajoutées à la dizaine pour former le « bit » inspiré du « Byth » runique, avec l’ambition de constituer une informatique non binaire. Aujourd’hui, cette idée, avec ses promesses technologiques, n’apparaît plus guère que comme un rêve déchu, un univers au mieux parallèle, biréfringent, une discipline parainformatique. Cette histoire fascinante détient toutefois le pouvoir, telle une pierre de soleil, de nous guider dans les eaux troubles d’une société numérique. L’histoire de l’Ogdenbit et de von Gøl constitue une véritable saga, qui tire son origine du mouvement nudiste germanique des années 1960 et qui aboutit à une histoire parallèle des « cryptomonnaies », celles qui sont, cette fois, littéralement générées dans des grottes.
Launne Frayzer, « L’ogdenbit : survivance et résistance »
  • De nos jours, l’ogdenbit est connu comme étant un plat servi à l’occasion de moments clés en République tchèque, notamment lors de cocktail ou de repas que l’on saura tendus. À plus petite échelle, l’ogdenbit est aussi, dans les familles tchèques, un plat apprécié pour son caractère fédérateur et sa facilité à partager. Il peut autant être servi pour des mariages que lors jours fériés (fête nationale, etc.). Nous savons également que, pour plusieurs, il est le symbole par excellence de l’union et de la solidarité et que, parfois, cette symbolique est suffisante pour apaiser les esprits les plus belliqueux.

    Notre communication aura pour but d’expliquer l’origine souterraine de ce plat typique et de retracer ses débuts comme aliment de survivance jusqu’à son avènement comme symbole de résistance et de communauté. En effet, avant de devenir le plat que l’on connaît aujourd’hui, l’ogdenbit était consommé uniquement pour ses caractéristiques favorisant un transport aisé et un entreposage facile. Sa préparation était des plus simples et il était consommé à la va-vite pour soulager l’estomac vide et soutenir le corps par son généreux apport en protéines et, sans surprise, en vitamine D.

    La communication sera suivie par une démonstration de la cérémonie de la consommation de l’ogdenbit et la dégustation de celui-ci.

Daniel Jigule, « Ogdenbit, contre-culture d’archéologie critique : deux cas de figure »
  • Cet article explore les deux principales périodes de fouilles du site d’Ogdenbit, avec une attention particulière portée à ce qui fut rétroactivement nommé le « phénomène Ogdenbit » par les savants européens.

    D’abord, nous présenterons en quoi consiste l’âge d’or de la Renaissance rhète (Rätische Renaissance), qui se situe entre 1875 et 1895, directement liée aux premières fouilles du site. Ce particularisme culturel en pleine teutomanie a de quoi surprendre, c’est du moins ce qu’expriment certains journaux libéraux de l’époque. L’élément central de cet engouement est l’œuvre du poète Heinrich Carl Oller, dont nous ferons une présentation succincte. Nous défendrons l’idée que la Renaissance rhète constitue une tâche aveugle dans l’unification culturelle allemande.

    Puis, nous étudierons la deuxième période de fouille, celle qui mit au jour les vestiges de la maintenant fameuse protoculture néolithique d’Ogdenbit. Bien que cette deuxième phase Ogdenbit n’atteignît pas le grand public et se limita majoritairement au monde scientifique, les fouilles eurent une importance historique et philologique non négligeable qu’il convient d’étudier.

    Ces deux fouilles, qui semblent bien distinctes si ce n’est que de leur proximité nominative et géographique, partagent cependant la même fonction : celle d’un contrepoids à la pensée dominante, un scrupulus ogdenbiti.

Vincent Marcotte, « Ogdenbit, un eyfambhourique ? »
  • Inutile de le rappeller, l’eyfambhourique est cette petite remarque savante que nous nous faisons tous dans une certaine mesure, lorsque nous prenons le temps de tracer, pour le plaisir, une distinction notionnelle entre phénomènes apparentés qu’un esprit moins subtil que le nôtre jugerait identiques, alors qu’une telle distinction ne sert strictement à rien. C’est le cas, par exemple, de toute la théorie des actes de langage (locutoires, illocutoires et perlocutoires) en philosophie analytique, comme si aucun couple ne s’était jamais marié et aucun pays ne s’était jamais déclaré souverain avant qu’une bande de fonctionnaires surpayés en robes de chambre ne remarquent que dire, eh bien, parfois c’est faire, aussi.

    L’Eyfambhourique qu’est lui-même le concept d’« eyfambhourique » (Axiome de l’identité et Corollaire de la récursivité), par sa capacité à rendre ridicule le discours intérieur, suscite un état de silence métaphysique et solennel, que les traditions occidentales et orientales auront tôt fait de baptiser « Gelaßenheit » ou « Dhyāna (Zen) », et que les Lorettains jésuites, beaucoup plus sçavants que les païens du Vieux Continent et de l’Asie, nommèrent « Ogdenbit ».

    L’Eyfambhourique s’exsulfe dialectiquement en se faisant Ogdenbit, mais l’Ogdenbit déchoit-il en eyfambhourique ?

    Linéaments d’une mystique lorettaine.

Galérien Morel, « La dissidence zen dans l’ogdenbit de Muromachi »
  • L’ogdenbit constitue sans conteste le « petit frère pauvre » des arts traditionnels japonais développés à l’époque de Muromachi (1336–1573). Et pourtant, cet art est sans aucun doute, avec le jardinage sec, celui qui incarne le mieux les principes de l’esthétique zen. Le déclin de l’ogdenbit s’explique par plusieurs facteurs, en premier lieu la manière excessivement élitiste dont il fut ritualisé, ne pouvant être pratiqué que par un seul maître vivant dans tout le périmètre du Mont Fuji, ainsi que le secret entourant sa méthode. Viennent ensuite des éléments exogènes, dont l’arrivée au XVIe siècle des Portugais avec leurs chevaux, et avec eux une souche virulente de grippe équine qui décima une partie importante de la population de poneys indigènes de l’île de Honshu. Or, le très rigoureux code de pratique de l’ogdenbit exigeait des brosses conçues avec du crin de Kiso de la plus pure qualité. La rupture d’approvisionnement que causa la grippe créa alors un schisme parmi les artisans. Laquelle de ces deux écoles, la puriste ou la dissidente, détenait la vérité sur l’ogdenbit ? C’est le problème que nous chercherons à résoudre, opérant par déductions à partir des seules sources, hélas indirectes, qui demeurent.
Clemant Seul-Au-Pré, « Ogdenbit, le joyau de l’Anti-Parlement »
  • L’Ogdenbit n’exige aucune introduction, lui qui repose à l’Anti-Parlement (actuellement à l’Ancienne-Lorette) depuis si longtemps. Entretenu avec ferveur par les anti-députés, l’Ogdenbit et ses énormes pages sélectivement rayées sont accessibles pour consultation publique – quoique le public s’y intéresse généralement peu de nos jours. C’est tout à fait compréhensible, car l’Ogdenbit, fort lassant, contient tous les textes légaux possibles et hypothétiques (sans égard aux dates) suivant la forme et syntaxe du Code civil québécois. Pour éviter toute confusion, les anti-députés, suivant la défaite d’une course à l’investiture provinciale, se rassemblent à l’Anti-Parlement pour entretenir le tome et garantir qu’aucun esprit fourbe ne tienne pour loi les articles présents dans l’Ogdenbit. Ce travail de moine a débuté après la célèbre révolte des Patriotes de 1837–1838. Les membres du Parti canadien, ayant cru à la légitimité de certains articles picorés par Papineau dans l’Ogdenbit, se sont lancés dans une lutte malavisée et fatale. Depuis, le gouvernement provincial prévoit un renouvellement de personnel pour parcourir les pages et rayer en temps réel les lois votées par l’Assemblée nationale, de manière à ce que l’Ogdenbit et le Code civil restent toujours mutuellement exclusifs dans leur contenu et impossibles à confondre.
Mâtho Térasau, « Ogden Bit, nouvel apocryphe ? »
  • Il est de notoriété commune qu’en histoire littéraire, l’ogdenbitie désigne, par métonymie, la pseudomynie. Cette communication a pour but de revoir ce paradigme en proposant une vision de l’Ogden Bit avant tout comme d’une apocryphie.

    Pour ce faire, et autour de la figure d’Oliver Whitehead Bitterhill, dit « Governor », banquier et libelliste anglais du XVIIIe siècle — dont les brûlots politiques en faveur des rébellions jacobites, signés O. G. Bit., ont fait naître, dans les manifestations et mouvements de foule, la clameur populaire « Ogden Bit ! » —, seront convoqués les apocryphes de l’humaniste et traducteur Le Motteux, la théorie freudienne de l’envie du pénis ainsi que le canular philologique des Chansons de Bilitis et de Pierre Louÿs, dont le testament littéraire, établi alors comme autre apocryphe par la critique, chamboule aujourd’hui la recherche en confirmant certaines hypothèses des archéologues à propos des papyrus d’Herculanum, lesquels nous renvoient à l’œuvre de l’épicurien Philodème de Gadara, à l’éruption du Vésuve, mais surtout à leur découverte dans les années 1750, — d’autant plus, et là est l’intérêt de cette communication, qu’Oliver Bitterhill aurait vraisemblablement été impliqué dans cette exhumation.

O. P. Thivierge, « Myopie, Presbytie, Ogdenbitie »
  • Comme il a si bien été formulé par l’équipe de Perspectives lorettaines, le « phénomène ogdenbit » est avant tout – comme on le sait, mais comme il est bon de le rappeler – une perception ayant évolué dans le temps. Toutefois, pour éviter l’inversion logique qui guette ici, précisons qu’il s’agit de la corruption de nos perceptions s’étant établie progressivement au fil du dernier siècle par le biais, entre autres mirages, de la diffraction phénoménologiste. L’ogdenbitie, là se trouve notre propos, est donc le mal qui ronge la capacité de l’œil contemporain à réellement percevoir, le constant geste de rupture qui hante nos regards.

    En tant que thérapeute de la vision, nous nous proposons d’aborder l’ogdenbitie dans une perspective étiologique frontale puisque c’est de cet angle seul que pourra apparaître le cœur du problème – et optimistement, ses solutions – sans que des réflexions obliques viennent flouter notre perspective sur cette déviance évasiste de l’œil. Dans cette optique, le sujet sera traité de manière à ce que le sujet-lecteur puisse être traité lui aussi s’il parvient à percevoir dans cette opération discursive l’illumination lui étant destinée – illumination potentielle qu’on pourrait qualifier simplement d’un pendant occidental du réalignement du Ājñā chakra.

    Si certains patients photosensibles souhaitent lever le voile plus progressivement sur cette thérapeutique, ils pourront en retrouver les faisceaux premiers dans ce que dit Freud de la pulsion scopique, dans L’Art de voir d’Aldous Huxley, dans les Metaphors on vision de Stan Brakhage ou encore, évidemment, dans L’histoire de l’œil de Georges Bataille.